UE1
03/02/05
P SEMENOWICZ
Suite des politiques de relance :
Deux plans de relance ont échoué (74 et 81), parce qu’on est en économie ouverte : il y a des fuites vers d’autres pays.
L’échec du plan de relance Mauroy marque un basculement dans la politique économique française. Depuis 83, on a une politique libérale, qui a d’abord été incarnée par Fabius.
Le « théorème » de Schmitt, chancelier allemand :
« Les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain, et les emplois d’après-demain ».
Ø le but de la politique économique est d’améliorer la situation financière des entreprises. (On se centre sur les entreprises plutôt que sut les ménages et la consommation) (Le Smic à + 38% n’avait pas aidé les entreprises)
L’idée est que si les entreprises font du profit, elles vont en investir une partie, et à terme créer des emplois.
Depuis 83, on a des politiques de désinflation compétitive.
Désinflation : pour que les entreprises restent compétitives par rapport aux entreprises étrangères, il faut essayer de maîtriser les prix pour gagner des parts de marché.
Pour cela, il faut comprimer la masse salariale : soit limiter la progression des salaires, soit supprimer du personnel.
- politique un peu schizophrénique : pour créer des emplois à long terme, on commence par en supprimer.
Dans les années 90, il y a eu augmentation des profits et des capacités d’investissement (les entreprises avaient des capacités d’autofinancement qui dépassaient leurs investissements effectifs).
Autre problème : qu’est ce qui se passe quand tous les pays se font ainsi concurrence ? > des politiques de moins disant social.
Tout le monde ne peut pas gagner à ce jeu, voire même, s’il y a diminution de la consommation, le gâteau à partager peut diminuer.
C’est une impasse, mais dont on ne peut pas sortir seul (le pays qui met en place autre chose est perdant).
Il n’y a pas assez de consensus entre les pays pour cela ; il faudrait une entente dans une zone assez large, et assez peu de fuites vers l’extérieur…
La stratégie européenne pour l’emploi existe depuis 97, mais est très limitée ; elle oblige chaque état à élaborer des plans pour l’emploi, mais les stratégies sont très différentes d’un pays à l’autre…
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On voit que l’emploi n’est plus au centre des politiques macro-économiques, dont les objectifs premiers sont : les profits, les parts de marché, la compétitivité…
On en espère des retombées, à terme, en terme d’emploi… Depuis 20 ans, on attend…
On n’a pas vraiment de politique de rechange. Le keynésianisme n’est pas possible à l’échelle d’un pays. Au niveau de l’Europe… ?
La seule possibilité : continuer pour ne pas être plus perdant…
Les gouvernement pensent que les politiques économiques n’influent plus (rapidement) sur l’emploi. Donc comme les politiques ne peuvent pas attendre après-demain, ils mettent en place des interventions directes.
2 Les interventions directes sur le marché du travail :
A -Les interventions directes d’inspiration néo-classique :
(rappel : + de flexibilité sur le marché du travail, baisse du coût du travail, suppression des syndicats)
1er axe : une plus grande flexibilité sur le marché du travail :
A croissance donnée, essayer que le marché du travail fonctionne mieux.
La grande bretagne et les USA l’ont fait de façon assez brutale dans les années 80 (ainsi que l’Australie et la Nouvelle Zélande) : la « révolution conservatrice »
En France, ça s’est fait de façon moins marquée, plus diffuse :
De 86 à 88 avec le premier gouvernement de cohabitation Chirac, : des mesures qui vont introduire « de la souplesse » sur le marché du travail :
· La suppression de l’autorisation administrative pour les licenciements économiques (cette autorisation avait été instaurée par Chirac, keynésien à l’époque, en 74). En 86 : il la supprime.
Les arguments : il vaut mieux que l’entreprise perdure, même avec peu d’emplois, plutôt que fermer.
Et surtout, ça encourage à embaucher de savoir que c’est plus facile de débaucher.
· Le recours facilité à l’intérim et au CDD. (les motifs sont rendus plus flous…)
En 86, l’intérim explose ; on assouplit la loi, les entreprises s’y engouffrent.
(le problème de l’absence de réglementation au niveau international : concurrence, moins disant social)
En 88 la réélection de Mitterrand :
Il n’est pas revenu sur ces mesures ; mais n’a pas été plus loin non plus.
Bérégovoy : a fait à titre d’expérimentation des exonérations de charges sur les temps partiels.
De 93 à 95 : la deuxième cohabitation :
Edouard Balladur, la Loi Quinquennale pour l’Emploi : des mesures qui relancent la flexibilité du marché du travail.
· Favoriser le temps partiel par une exonération partielle de charges. (cf les Pays bas, - de croissance, + d’emploi, + de temps partiels)
Embaucher 2 personnes à mi-temps revient moins cher qu’une personne à temps plein (d’où les caissières à temps partiel).
(cet effet a été annulé par Jospin au moment des 35h, maintenant ça revient au même, 2 p à mi-temps ou une à TP)
Il y a eu une progression phénoménale du temps partiel dans les années 90 ; et une baisse du chômage : ça a surtout marché pendant la mini-reprise de la 2ème moitié des années 90.
· L’annualisation du temps de travail :
pour permettre aux entreprises de s’adapter aux fluctuation de la demande, on leur permet de faire travailler + ou – le salarié selon les moments.
Les entreprises font des économies en terme de paiement d’heures supplémentaires.
L’annualisation s’est aussi beaucoup développée avec les 35 h, en échange …
Le temps libre des ouvriers est souvent imposé, pas choisi.
Le mouvement général est donc : toujours plus de flexibilité.
La seule exception : la loi de modernisation sociale de Jospin, avait alourdi le coût des licenciements.
Elle n’a pas duré avec le changement de gouvernement.
2ème axe : une réduction du coût du travail :
Ce qui est incriminé, c’est l’existence d’un salaire minimum. > il faudrait supprimer le Smic –mais c’est très impopulaire.
On a donc cherché à diminuer le coût du travail ; celui-ci est constitué du salaire net, des cotisations salariales et des cotisations patronales.
Ø choix d’une politique de baisse des charges, sur la part des cotisations patronales.
(on l’avait déjà fait au milieu des années 70 sur des publics cibles, les jeunes…)
En 93, la loi quinquennale pour l’emploi met en place un dispositif général d’abaissement du coût du travail sur les bas salaires.
Les bas salaires sont à ce moment définis comme compris entre 1 et 1,2 fois le Smic. L’exonération concerne tous les salariés, même ceux déjà en place : elle n’est pas liée à l’embauche.
(il y a un système de compensation de l’état vers la Sécurité Sociale, mais pas total).
Remarque : le montant des exonérations de charge correspond au déficit de la Sécu.
A l’heure actuelle, on ne sait pas comment sont financées ces exonérations.
L’écart entre les salaires a beaucoup augmenté en 30 ans : les écarts à profession donnée et à temps plein ; les écarts en prenant en compte les temps partiels. Mais avec le RMI, les écarts de revenus sont contenus.
En 2003, le dispositif Fillon a élargi les exonérations de charges sur les bas salaires jusqu’à 1,7 fois le Smic.
C’est le premier poste de dépenses pour l’emploi, concerne 1 salarié sur 2.
Ses effets pervers :
- des effets d’aubaine : les entreprises en bénéficient, sans contrepartie.
- Des « trappes à pauvreté » : les entreprises n’ont pas intérêt à augmenter les salariés à 1,8 fois le Smic !
(les exonérations sont dégressives quand le salaire augmente)
Pourquoi cible-t-on les bas salaires ?
· Parce que le chômage touche principalement les peu diplômés
· Parce qu’à exonération égale ça va avoir plus d’impact sur les bas salaires que ça en aurait sur des gros.
On espérait aussi développer le marché, la consommation dans certains secteurs.
Bilan de ces politiques de réduction du coût du travail :
Ø Positif : depuis 94 on a une hausse du nombre d’emplois peu qualifiés, essentiellement dans les services – à corriger par la progression du temps partiel.
On a enrayé la disparition programmée du nombre d’emplois non qualifiés, on est revenu au taux du début des années 80.
(la théorie des néo-classiques a une part de vérité, ça fonctionne )
Ø Négatif : le nombre de créations d’emplois est limité au regard des moyens consacrés.
Il est très difficile d’évaluer l’impact de ces mesures.
Selon les évaluations, il y aurait eu entre 200 000 et 500 000 emplois créés ou sauvegardés sur 10 ans.
B - Les mesures (interventions directes) d’inspiration keynésiennes :
Une mesure récente : l’ARTT peut être considérée comme d’inspiration keynésienne (dans ses mécanismes, les conséquences attendues…)
Les mesures Fillon concernent toutes les entreprises, y compris celles qui ne sont pas passées aux 35h ; auparavant, il y avait des compensations liées aux 35h et à l’ARTT.
Les effets de l’ARTT pour les néo-classiques
La RTT entraîne
Une hausse du coût du travail (en terme horaire)
Donc :
Une diminution de la Une augmentation
Demande de travail des prix des produits
des entreprises par hausse des coûts
de production
Donc du chômage donc une baisse de la
compétitivité
Donc des pertes de part de marché pour les entreprises françaises
Donc du chômage
Les effets de l’ARTT pour les keynésiens :
La RTT entraîne :
Des créations d’emploi à production constante (le niveau de l’emploi dépendant chez Keynes de la demande effective et non du coût du travail)
Donc une hausse du pouvoir d’achat des ex-chômeurs
Une hausse de la consommation
Une hausse de la production
Une hausse de la demande effective
Des créations d’emploi
Une diminution du chômage.
Pour les néo-classiques, la RTT est une mauvaise mesure.
La Réduction du Temps de Travail (qui est aussi une amélioration des conditions de vie) avant :
1936 : Le Front Populaire réduit le temps de travail à 40 heures (au lieu de 48) et crée 2 semaines de congés payés.
But : l’amélioration des conditions de vie des salariés.
1981 : Passage aux 39h + la 5ème semaine de congés payés (une compensation au non passage aux 35h, qui était au programme de Mitterrand).
Le but était déjà la lutte contre le chômage. Mais une réduction d’une heure n’a pas été efficace.
Après, on n’a plus parlé de RTT.
On y est revenu au milieu des années 90, essentiellement parce que les politiques néo-classiques montraient leurs limites.
1996 : La Loi Robien (UDF)
(Le contexte s’y prêtait ; publication de « La fin du travail » de Jérémy Hipkins ; + le travail en voie de disparition)
Un dispositif incitatif : on n’agit pas sur la durée légale du travail, mais on propose aux entreprises disposées à le faire de passer aux 35h, moyennant des aides sous certaines conditions.
Les conditions sont :
- une baisse de 10% de la durée effective du travail (= 35h)
- une hausse de 10% des effectifs,
donnent droit à des aides par des allègements de charges.
Il y a eu des passages aux 35h , mais ça a concerné un nombre très limité d’entreprises. Cela n’a pas eu un véritable impact sur le chômage, c’est resté trop marginal.
1998 : Abrogation de la loi Robien et passage aux lois Aubry, ARTT (Aménagement et Réduction du Temps de Travail).
Hypothèse : le chômage est lié à l’insuffisance de la demande.
Juin 98 : la 1ère loi Aubry :
- Elle fixe les échéances : 01/2000 pour les entreprises de plus de 20 salariés et 01/2002 pour les moins de 20 salariés.
- Elle comporte un volet incitatif : si vous faites le passage avant, on vous aide (sorte de coup de poker, on ne sait pas si il y aura des aides après), aux conditions suivantes :
- - 10% de temps de travail
- + 6% de hausse des effectifs.
Janvier 2000 : la 2ème loi Aubry.
- Elle instaure véritablement la nouvelle durée légale du travail à 35h (application)
- Elle instaure des aides pour les entreprises qui passent aux 35h mais sans obligation en terme d’embauche.
(les aides sont moins importantes que dans la loi Aubry 1 : une aide forfaitaire de 610 euros + des allègements de charge dégressifs jusqu’à 1,8 fois le Smic). Il fallait qu’il y ait un accord au niveau de l’entreprise.
- Le plafonnement des heurs supplémentaires : un plafond annuel de 130 heures sup par salarié, majorées à 25%.
Ca se voulait assez équilibré : baisser les horaires, mais avec des compensations, + des accords, qui pouvaient entraîner des gains de productivité…
Cette deuxième loi comprend :
- une première reculade : il n’y a aucune exigence en terme d’embauche.
- une deuxième reculade : pour les entreprises de moins de 20 salariés, il y a un régime dérogatoire ; au début, prévu jusqu’en 2005 ; maintenant, jusqu’en 2008 (avec le changement de gouvernement).
Fin 2002, le loi Filon a assoupli le régime des heures supplémentaires :
- le contingent d’heures supplémentaires passe de 130 à 180 h (ce qui revient presque à 39h)
- la majoration : c’est à chaque branche de négocier… une majoration comprise entre 10 et 25%.
Fin 2004, un décret fait passer le plafond des heures supplémentaires à 220 h (proche des 40h hebdo).
Actuellement, en débat, l’extension du Compte Epargne Temps, (à l’ARTT, à la 5ème semaine..)
Ø On n’est jamais véritablement passé aux 35 heures pour l’ensemble des salariés, et on n’en prend pas le chemin…
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Quel bilan en terme de création d’emploi ?
En terme de satisfaction, c’est positif pour les cadres (travaillaient déjà avec la pression)
C’est négatif pour les ouvriers (ont plus de pression, certains n’ont leurs horaires qu’une semaine avant…)
En terme d’emplois, on a une seule évaluation de la DARES (ministère du travail) : l’ARTT aurait permis de créer ou sauvegarder 350 000 emplois entre fin 96 et fin 2002, c’est à dire environ 20% des emplois nés sur cette période.
C’est moins que les annonces faites, mais les entreprises ont traîné les pieds.
(Critique de l’enquête de la DARES : ne prend pas en compte le bouclage macro-économique (les retombées sur et par les finances publiques).