Synthèse de Notes de HENRY Stéphane et Martine Gatineau le 10/02/05
Modèles d'interprétation 6
Rappel du Plan de cet enseignement
Introduction
I. Le positivisme (A comte) vient des disciplines machinistes et physiques
II. Le fonctionnalisme (E.Durkheim) positivisme transformé
III. Modèles issus de la théorie marxiste (P.Bourdieu)
IV. La sociologie compréhensive (Max Weber) : comprendre subjectivement l'individu
V. Le structuralisme (Lévi Strauss) c'est la linguistique qui construit le structuralisme
VI. L'individualisme méthodologique (R.Boudon) ≠ opposé à Bourdieu sur la question de l'échec scolaire (Pour Bourdieu l'échec scolaire est déterminé par la catégorie sociale, alors que Boudon il s'explique par les choix familiaux.
VII. Les théories de l'acteur (Crozier)
VIII. Le courant pragmatique
IX. L'éthno-méthodologique et l'interactionnisme symbolique (Irwin Gofman – Ecole de Chicago)
(suite cours précédent)
Avec Boudon, on entre dans des modèles plus individualistes, dans la centralité du concept d’acteur. On parle d’acteur, y compris d’acteur rationnel qui organise des stratégies.
Crozier a écrit l'ouvrage avec Friedberg "l'acteur et le système"
La sociologie des organisations va considérée l'acteur à la fois contraint par le système et possédant une certaine liberté dans le sens où il peut se trouver des marges de manœuvre.
Pour Crozier, l'organisation est un ensemble qui a des missions et qui met en œuvre un certain nombre d'acteurs pour accomplir ces missions. Une organisation et ses acteurs peuvent se repérer par un organigramme. Dans une organisation, il existe des hiérarchies de pouvoir qui s'illustrent par un organigramme plus ou moins centralisé, ou parallèle. L'organigramme nous donne une vue première du type d'organisation. Toute organisation est en lien avec un environnement (concurrent, fournisseur, clients, rectorat, ministères, collectivités etc.). On définit une organisation par ses rapports qu'elle entretient avec son environnement.
La question du pouvoir explique presque toute l’organisation :
4 pouvoirs au sein des organisations ont été reconnus par Crozier :
L'acteur est soit un individu ou un groupe d'individus qui font fonctionner l’organisation.
Ces acteurs sont à la fois placés dans l'organisation avec des rôles bien définis, et l'organisation définit aussi le rôle de chacun. Mais, l’organisation admet que la façon de remplir son rôle n’est pas absolument définie. Les acteurs possèdent alors une certaine marge de manœuvre. Dans toute organisation, il existe des zones d'incertitudes qui peuvent être différentes selon le mode d'organisation. Les acteurs utilisent ces zones d'incertitudes, ou zones de flous dans lesquelles ils ne sont pas contraints pour développer leur stratégie.
Au-delà de l'organigramme, il se passe des choses qui ne sont pas prévues dans l'organigramme. A coté de l'organigramme formel, il existe un réseau informel, utilisé par les acteurs pour y développer aussi des stratégies.
Les acteurs utilisent toujours des stratégies pour accroître leur pouvoir dans les différents modes d'organisation (voir plus haut). Parfois l'accroissement de pouvoir peut aller dans le sens du bon fonctionnement de l'organisation, tout comme il peut nuire à sa bonne marche en provoquant des dysfonctionnements. L'idée pour l'acteur est toujours d'acquérir du pouvoir.
C’est lorsqu’il y a dysfonctionnement que l’on fait appel aux sociologues des organisations.
La résistance au changement
Une des théories de la résistance au changement est, qu'avant le changement, les acteurs ont mis en place toutes sortes de stratégies qui leur ont permis d'acquérir du pouvoir. Dès lors que survient un changement d'organisation, un bon nombre de stratégies vont s'effondrer. Cela implique la reconstruction d’une nouvelle stratégie d’acteur. (Les acteurs devront reconstruire leurs stratégies qui leur avaient permis de posséder du pouvoir et rien ne suppose qu'ils pourront en développer autant dans la nouvelle configuration de l'organisation.)
Exemple :
A partir d'une ville importante, une commande est passée auprès de sociologues des organisations pour comprendre ce qui se passe dans certains services de leur compétence. En effet ils constatent que dans les services indiqués, il y existe un problème qu'ils ne parviennent pas à identifier, mais qui a toujours pour même conséquence, l'éviction du cadre en place.
Les services généraux sont proches de la mairie. Il existe 3 services dans un parc de la ville : le service des espaces vert, le centre de loisirs et la cantine avec pour chacun de nombreux personnels à gérer.
Il semble que le problème soir plutôt centré sur la cantine. L'équipe de sociologue a procédé à divers entretiens auprès de tous les personnels. Ils découvrent dans un premier temps que le cousin du maire travaille à la cantine. Cependant, ce n'est pas sa seule présence qui peut expliquer les dysfonctionnements dans ce service.
On se préoccupe aussi de la place du gardien Dans sa fonction, il est chargé de veiller à la sécurité des lieux et de rendre divers service propre à sa fonction. On constate aussi qu'il a une position le mettant au centre des communications des trois services. Dans sa loge, il y a toujours du café, une table quelques chaises et tout le personnel de trois services peut s'y rencontrer. Lors des entretiens, on constate que le gardien n'a pas toujours été gardien, mais qu'il a occupé un poste hiérarchiquement plus important avec du personnel à gérer. Il semble qu'il a été écarté de ce poste. Dès lors, il été possible d'avancer plusieurs hypothèses sur les origines des dysfonctionnements.
2. La sociologie de l'action (A. Touraine)
Ce sociologue a la particularité d'adapter son modèle théorique des changements de société.
Il a écrit les ouvrages suivants : (liste non exhaustive)
- " L’évolution du travail ouvrier aux usines Renault ", CNRS, 1955
- " Sociologie de l’action ", ed. du Seuil, 1965
- " Le mouvement de mai ou le communisme utopique ", ed. du Seuil, 1968
- " La société post-industrielle ", Denoêl, 1969
- " La production de la société ", 1973, réed. " Le livre de poche ", 1993
- " La société invisible ", Seuil, 1976
- " La voix et le regard ", Seuil, 1978
- " Le retour de l’acteur ", Fayard. 1984
- " La parole et le sang ", Odile Jacob, 1988
- " Critique de la modernité ", Fayard, 1992
- " Qu’est-ce que la démocratie? ", Fayard, 1994
La sociologie de l'action est une sociologie qui pense en terme d’acteur et pense plutôt la société comme conflit. [ou l'action dans le conflit (influence marxiste). La sociologie de l'action consiste à repérer des acteurs et plutôt dans les mouvements sociaux. Il en fait une construction théorique avec notamment la notion d'historicité (capacité à maîtriser son histoire et par conséquent a construire l'avenir en tenant compte du passé)
Un mouvement social, un acteur ne se construit jamais si bien que si il a un adversaire. Construire étant entendu dans le sens de se construire une identité.
La sociologie de l'action va, en laboratoire, essayer de faire avancer ces mouvements sociaux plus rapidement que la réalité. Ceci est une rupture épistémologique : c’est un peu un retour en arrière par rapport à Weber (cf. le savant et le Politique), la sociologie venant à faire de la politique.
Il s'est trompé sur :
Il a pensé que le mouvement antinucléaire détenait toutes les caractéristiques pour relayer le mouvement de la lutte des classes.
Dans les années 75-80 il n'y a plus de mouvements sociaux du moins comme il les avait décrits et, Touraine change sa vision de l'acteur en écrivant "le retour de l'acteur" et « La critique de la modernité ». Il théorise différemment son analyse de l’individu et de la société. Dans le Retour de l’acteur, Touraine explique que les mouvements sociaux ont disparu et dans cette société moderne marquée par l’absence de conflits de classes et de mouvements sociaux, c'est le retour de l'individu/acteur, ce qui implique que le pouvoir est moins fort. Pour lui cet individu/acteur est capable de maîtriser son historicité (histoire et maîtrise du sens de ses pratiques)
Avec "la critique de la modernité", Touraine parle du sujet à la place de l’acteur. Si cette société n'est pas capable de faire advenir le sujet, elle va mourir. Il faut donc pour qu'elle puisse subsister, qu'elle laisse une place au sujet.
Le sujet pour Touraine se définit comme suit :
Un sujet serait un acteur qui serait capable de ne pas dépendre des rôles et des relations sociales, des places que la société lui assigne.
Le sujet c'est le désir de l'individu de se créer une histoire personnelle, de donner un sens à sa vie et à son experience personnelle contre les marchés et les communautés. C’est l’histoire de l’intériorisation de soi-même en accord avec sa subjectivité, indépendamment de la société.
Nous n’avons le choix qu’entre :
-être dominé par le marché,
-et, être dominé par la culture, le communitarisme.
Pour Touraine, c’est la culture qui fait la communauté.
Aujourd’hui, l’idée de l’éthique est plus importante que celle de la morale.
Sa définition du sujet est plus philosophique, volontariste que sociologique.
Pour Touraine, l’immigré est l’emblématique du sujet car il est d’içi et d’ailleurs, dans une recomposition du monde.
L'intégration ou les rapports du migrant avec la société
vus par les différents courants sociologiques
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Leurs questionnements |
Les Méthodes |
Applications sur le terrain |
Les positivistes A Comte |
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observer expérimentation Construction d’un échantillon (origines différentes), de variables (vêtement, alimentation, religion…) Comparaisons Statistiques |
Lois |
Les fonctionnalistes E. Durkheim |
Quel est le rôle des migrants dans la société ou l’influence de la société sur les immigrés. Quels sont les processus à l'œuvre pour leur intégration dans la société. Ils chercheraient la causalité de ce phénomène |
statistiques, méthodes quantitatives
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Chez les marxistes |
qu'est ce qui fait venir ces immigrés, comment ils verraient leur place dans la société et dans les modes de production
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statistiques, méthodes quantitatives
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Chez Weber |
Il s'attacherait à comprendre le phénomène, comprendre pourquoi ils sont venus, comment ils se sentent dans la société accueillante. Trajectoires individuelles (pourquoi certains migrent et pas d’autres). |
Idéal-type du phénomène migrant entretien qualitatif |
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Chez les structuralistes |
ils pourraient essayer de voir les éléments sous-jacents communs à toutes les migrations |
analyse comparative ou travail de correspondance |
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Pour Boudon
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Il s'intéresserait sur le choix qu'adopterait le migrant en partance après en avoir étudié les coûts et les avantages/inconvénients. Il regarderait ensuite les choix individuels cumulés et les effets qu'ils produiraient. |
analyse de trajectoires individuelles à l’aide d’entretiens et statistiques effets pervers |
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Crozier
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Leur place dans la société d'accueil, organisation des migrants, les organisations institutionnelles dans lesquelles ils peuvent s'inscrire |
Observations, entretiens |
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Touraine
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Les mouvements, l'acteur Comment des migrants qui partent de communautés [et comment ils] s'individualisent Sociologie de l'action comment ils se constituent en groupe social face à la société accueillante
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